Evidence Based Medicine: Entre progrès scientifique et recul de la science clinique.
- Olivier Salavert - Ostéopathe D.O.
- Apr 4, 2016
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Notre Ministre de la santé, Maggie De Block veut geler toutes les caractéristiques qui ont fait le succès de l'ostéopathie. Limiter son accès et lui interdire son titre de médecine de première ligne, en opposition à toutes les décisions européennes et en bafouant le travail accompli depuis 1999 sur base de la loi Colla.
Imputant une réputation dangereuse à l'ostéopathie alors qu'à ce jour le nombre d'accidents restent clairement inférieur à celui des autres pratiques médicales, Maggie de Block utilise l'EBM pour imposer à l'ostéopathie une image de thérapeutique non fondée sur des recherches cliniques, remettant même totalement en question son efficacité.
Nous avons vu dans l'article précédent que l'accès à ce genre de recherches était extrêmement difficile pour les thérapeutiques non médicamenteuses. D'abord sur un point de vue méthodologique (inexistence d'un placebo, utilisation de formulaires subjectifs validés pour remplacer des mesures quantifiables, etc) mais avant tout pour une question de financement.
Les fonds alloué par le FNRS aux facultés des sciences de la motricité (kinésithérapie, ergothérapie, ostéopathie, etc) sont pratiquement nuls en regard de ceux alloués à la pharmacopée. Hors bien des concepts ostéopathiques mériteraient d'être confronté à des tests quantifiables afin d'en sortir des concepts biomécaniques validés.
A ma connaissance, seuls les travaux de Walid Salem ont tenté à ce jour d'estimer grâce à des mesures radiologiques l'impact d'une manipulation HVBA sur la mobilité articulaire avant et après manipulation.
L'EBM étant utilisé comme outil politique pour attaquer l'ostéopathie, nous utiliserons ici la deuxième partie de la critique fournie par le Dr Luc Perino comme élément de discussion sur la juste place à donner à l'EBM dans l'arbre décisionnel médical.
Selon ce lui, l'EBM doit être utilisé pour poser une décision médicale en tenant compte des préférences du patient et de l'expérience clinique du thérapeute.

Hors le Dr L. Perino évoque une pyramide de soumission face à l'EBM effaçant lentement le bon sens clinique du praticien et les préférences du patient. La grand danger de cette approche s'illustre clairement par ce qui constitue le coeur même de la recherche clinique: la courbe de gauss ou loi normale.

Cette courbe est la base de notre enseignement médical, elle permet de comprendre la répartition d'une efficacité thérapeutique sur une population homogène. Il n'est nul besoin d'expliquer que la réalité d'une consultation ne peut se résumer à cette image. Tout l'intérêt des deux autres cercles de pensées que sont l'expérience clinique et les préférences du patients permettent de remettre ce dernier au centre de notre courbe afin d'améliorer la réaction du patient à la thérapeutique et donc sa satisfaction vis à vis du traitement.
Comment concilier les conclusions de l'EBM avec un bon sens clinique ? Que penser des dernières conclusions sur la recevabilité des publications EBM portant à seulement 10% d'essais cliniques valables ?
Car en abordant l'importance de l'EBM et la soumission du monde médical à cette approche scientifique, l'attitude de la Ministre Maggie De Block sur les thérapeutiques non médicamenteuses devient beaucoup plus discutable.
Car dans le cas de l'ostéopathie, si la recherche est relativement pauvre à ce sujet, l'expérience clinique des médecins sur cette approche l'est tout autant. Les patients se présentant en consultation avec un ordre médical sont extrêmement rares! Il n'est nul besoin alors de préciser quel est le cercle cité plus haut qui rempli les cabinets d'ostéopathie.
Depuis 1999 et la loi Colla, l'ULB à accueilli l'ostéopathie au sein de sa faculté de médecine permettant ainsi d'offrir un enseignement performant et assurant que les futurs ostéopathes puissent assurer des soins de première ligne. Il n'aura pourtant pas fallu cette étape pour que quelques meta-analyses (de qualités variables) attribuent des résultats au moins égaux à ceux de la kinésithérapie.
Tous ces efforts pour donner à l'ostéopathie ses lettres de noblesse et lui retirer sa part d'obscurantisme presque religieux sont passés sous silence par notre ministre en utilisant l'EBM comme un référentiel scientifique indiscutable.
Or "si la science doit critiquer incessamment chacun de ses savoirs partiels ; vouloir en imposer un seul comme référentiel, relève de l'obscurantisme, du fanatisme ou du dogmatisme. L'EBM est un progrès réel dans l'histoire de la médecine, son monopole est un recul de la science clinique." - Dr Luc Perino
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